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PREAMBULE à l’HYPOTHYROIDIE

« Ce que vous ignorez peut-être sur l’hypothyroïdie, ce que votre médecin ne vous a pas dit ou ce qu’il ne sait pas lui-même ».

D’où vient mon intérêt pour la thyroïde?

Lorsqu’en 1975 j’ai commencé à étudier la rhumatologie à Paris à l’hôpital Lariboisière et à faire mes stages à la Fondation A. de Rothschild dans le service de rhumatologie du Dr. Yves Chaouat, je constatais que bon nombre de patients qui consultaient en milieu hospitalier présentaient une pathologie mal définie associant des douleurs musculaires et tendineuses diffuses et une extrême fatigue. Qu’on les ait étiquetés comme souffrant de polyentésopathie, de fibrosite, de rhumatisme musculaire ou de syndrome polyalgique idiopathique diffus, le dénominateur commun était que ces patients étaient essentiellement des femmes, entre 20 et 50 ans, que les troubles étaient quotidiens, installés depuis plusieurs mois, et répondaient mal aux antalgiques classiques et aux anti-inflammatoires. Etant donné ce contexte et l’origine mystérieuse de cette pathologie, elle est apparue être de nature psychosomatique et ces patientes recevaient un traitement antidépresseur par voie orale ou en perfusions intraveineuses en séries itératives.
En 1980 sont apparus dans le monde médical deux diagnostics qui n’existaient pas auparavant, la fibromyalgie (FMS) et la fatigue chronique (CFS). C’était l’étiquette diagnostique qui convenait à ces malades, fibromyalgie lorsque les douleurs prenaient le devant du tableau clinique, fatigue chronique lorsque la fatigue prédominait. Mais cela ne changeait en rien la prise en charge de ces patients.

J’ai continué à fréquenter le service rhumatologie à la Fondation A. de Rothschild et cela jusqu’en 1989. J’ai écrit

une thèse de rhumatologie (Cliquez ici). Mais entre-temps, en 1981, je m’étais installé à Paris comme médecin généraliste (Cliquez ici). En m’intéressant de plus près à ce type de patientes qui avaient souhaité me suivre dans le privé, je remarquais que la majorité d’entre elles présentait également des troubles liés à un dysfonctionnement thyroïdien, que l’aspect dominant du tableau clinique soit musculo-squelettique (FMS) ou la fatigue (CFS). Pour avoir fait un stage de 6 mois dans un service d’endocrinologie quelques années auparavant, j’étais bien au fait de tous les aspects cliniques de l’hypothyroïdie. En 1981, le test de la TSH existait déjà.

Depuis le début du vingtième siècle des tests s’étaient succédés et chaque nouveau test qui était déclaré fiable pour dire si une personne était hypothyroïdienne ou hyperthyroïdienne s’avérait finalement ne pas être compatible avec les données cliniques (Cliquez ici). Enfin, le test de la TSH a été découvert et a été vanté comme la réponse finale. Cette l’hormone stimulant la thyroïde fait partie du mécanisme de rétroaction hypophysaire qui contrôle la glande thyroïde. Le consensus de thyroïdologistes a décidé en 1973 que la TSH était le test sanguin qu’ils avaient cherché tout au long de ces années. La TSH était non seulement capable de livrer tous les diagnostics de la thyroïde, mais elle pouvait aussi être utilisée pour le suivi du traitement. Depuis, et jusqu’aujourd’hui, presque chaque discussion conventionnelle sur la maladie de la thyroïde se focus presque exclusivement sur l’utilisation de la TSH comme le «gold standard» diagnostic pour les maladies de la thyroïde et leurs traitements, et indépendamment des symptômes. Typiquement, si le taux de la TSH est supérieur à la valeur normale, un patient est diagnostiqué comme souffrant d’hypothyroïdie et des niveaux de la TSH sous la normale sont interprétés comme hyperthyroïdie. Au fil du temps, le test de la TSH a été rendu de plus en plus sensible et en raison de ces améliorations, il a été de plus en plus considéré comme la réponse parfaite pour le diagnostic et le suivi du traitement de la thyroïde. Les connaissances sur le métabolisme thyroïdien ont également évoluées.

Donc, pour en revenir à mes patients souffrants de fibromyalgie et du syndrome de fatigue chronique, dès 1981, lorsque je me suis installé, j’étais en mesure de m’appuyer sur le test de la TSH pour étayer mes constatations relatives aux signes et symptômes d’hypothyroïdie que la majorité présentait, en plus de leurs douleurs musculo-squelettiques et de leur fatigue. Je n’ignorais pas que ces douleurs et cette fatigue pouvaient cadrer avec le diagnostic d’hypothyroïdie, c’est-à-dire qu’ils étaient décrits dans la sémiologie de l’insuffisance thyroïdienne. Certains avaient un taux élevé de la TSH, confirmant mon diagnostic d’hypothyroïdie, mais pour d’autres, la plupart, bien que leur symptomatologie d’hypothyroïdie ait été ancienne, les taux de la TSH étaient normaux, c’est-à-dire dans les valeurs de référence. D’ailleurs, et c’est ce que j’ai constaté au fil des années, beaucoup de gens développaient des signes et des symptômes classiques de l’hypothyroïdie, mais leur TSH était toujours aussi lente à devenir anormale et s’élever pour confirmer le diagnostic clinique. Parfois elle ne s’élevait jamais.

En tout cas, dès 1981, que la TSH soit élevée ou non, j’ai commencé à traiter ces patients avec l’hormone thyroïdienne de la façon normale qui m’avait été enseignée en Faculté. Pour ceux qui avaient une TSH normale, je ne voyais aucune raison d’attendre que la TSH s’élève pour commencer à traiter. Je m’étais toujours intéressé à la recherche médicale, et là, personnellement, je pouvais apporter une pierre à l’édifice. Je décidais de ne confier aucun de mes patients à un endocrinologue et cela pour deux raisons. Premièrement parce qu’aucun n’aurait accepté de traiter des patients avec une TSH normale, et deuxièmement parce que le consensus entre endocrinologues était de ne commencer à traiter les patients qu’une fois leurs TSH supérieures à 10 mUI/l, c’est-à-dire bien au-dela de la norme, quelle que soit la symptomatologie, et cela je ne l’acceptais pas. J’ai vite eu la conviction que la TSH pouvait être loin « à la traîne » derrière l’apparition des symptômes d’un hypofonctionnement de la thyroïde. Il n’y avait pas de relation entre la TSH et la façon dont les gens se sentaient. Cela s’est avéré exacte tout le long de ma carrière. La valeur de la TSH n’a pas de corrélation clinique sauf aux extrêmes absolus avec des signes ou des symptômes sévères. Les raisons de cette situation sont complexes et j’en donnerais les explications plus loin dans cet exposé.

Les résultats ont été spectaculaires. La grande majorité des patients que je traitais avec l’hormone thyroïdienne voyaient tous leurs symptômes de fibromyalgie et de CFS disparaître – ou quasi tous. Certains nécessitaient une plus grande dose que d’autres. Si le traitement était arrêté pour quelle que raison que ce soit, les symptômes commençaient à revenir lentement au cours des mois suivants. Malgré tout, je n’ai pas cessé de demander des dosages de la TSH, curieux que j’étais de savoir où ils se situaient face à des patients qui présentaient un diagnostic clinique évident d’hypothyroïdie.

Alors d’où nous venaient ce deux « nouvelles » maladies, FMS et CFS? Dès que j’ai commencé à m’y intéresser, une recherche en bibliothèque m’appris que dans la liiérature médicale des années 1930 les symptômes et les signes de ces deux maladies, qui n’étaient pas alors identifiées, étaient décrits comme possibles expressions d’une hypothyroïdie. Ce n’était pas pour me surprendre. Traités tôt, ils avaient été corrigés par des doses adéquates d’hormone thyroïdienne. Les cliniciens avaient déjà remarqué que si ces patients avaient un hypofonctionnement de la thyroïde depuis longtemps, tous les signes et les symptômes, indépendamment de ce qu’ils étaient, étaient difficiles à s’amender. Ces médecins du passé, pendant des décennies (avant la TSH), étaient de fins cliniciens et avaient été en mesure de diagnostiquer et de traiter correctement l’hypothyroïdie sans la TSH – pourquoi en avons-nous besoin maintenant? En tout cas, à se focaliser désormais par trop sur les tests biologiques, les médecins d’aujourd’hui accordent moins de poids aux manifestations cliniques.

Ainsi, cela confirmait ce que je suspectais déjà fortement, la fibromyalgie et la fatigue chronique étaient toutes deux intimement rattachées à l’hypothyroïdie. C’est ce qu’ont démontré les travaux du Dr. John C. Lowe, Directeur de Recherche pour la Fibromyalgia Research Fondation et l’un des innovateurs dans le diagnostic et le traitement de l’hypothyroïdie, travaux que je relate dans cette étude. Les médecins de l’époque seraient sûrement atterrés par le manque total d’appréciation par les médecins de nos jours des signes cliniques d’un hypofonctionnement thyroïdien dont se plaignent tant de patients souffrant de fatigue chronique et de fibromyalgie. Parce qu’une TSH la plupart du temps dans la norme chez ces patients ne les y incite pas. Et parce que leur TSH est dans la norme, la cause qui sous-tend leurs troubles n’est pas prise en compte. Cela est valable pour toutes les hypothyroïdies primaires, dont la forme la plus fréquente est la maladie d’Hashimoto et dont le diagnostic est malheureusement trop souvent retardé, voire négligé, pendant des années parfois, en raison d’une soi-disant TSH dans la norme, laissant les malades souffrir inutilement et traités par des médicaments symptomatiques, antidépresseurs, antalgiques, vitamines et autres, tous sans efficacité sur la cause primitive non diagnostiquée, l’hypothyroïdie (Cliquez ici).

Le Dr. Anthony Toft, endocrinologue et Président de l’Association Britanique sur la thyroïde, écrit dans la Bible de la thyroïdologie de Werner et Inghar, « The Thyroid », publiée en 1991, que la seule mesure de la TSH ne reflète pas toujours l’état fonctionnel de la thyroïde et qu’une TSH dans ses valeurs standards n’élimine pas une pathologie thyroïdienne. Alors, est-ce la norme de référence de la TSH qui pose problème? J’en discuterai plus loin. Est-ce que le diagnostic des maladies de la thyroïde doit se baser essentiellement sur ce seul test? Certains experts disent que non, opinion que je partage. En tout cas, il est urgent que les médecins reviennent à « leurs classiques », à savoir la sémiologie de l’hypothyroïdie, ses signes et ses symptômes, même dans sa phase débutante, et aussi, et c’est cela l’essentiel, ils doivent être à l’écoute de leurs patients. Quant au traitement, ils s’obstinent à suivre un test, cherchant à le normaliser, alors qu’il n’a pas de corrélation avec la présentation clinique.

J’ai eu beaucoup de surprises agréables de personnes gravement handicapées par la fibromyalgie ou de fatigue chronique pendant des années qui lentement voyaient leurs symptômes disparaissent. Il est bien sûr un plaisir de voir cela se produire.

Voilà comment je me suis intéressé à la thyroïde, à sa physiologie et à son traitement. Puis sont venus me consulter des malades thyroïdiens dépourvus de fibromyalgie ou du syndrome de fatigue chronique, ou apparemment. Il s’agissait d’équilibrer leur hypothyroïdie insuffisamment soignée puisque subsistaient des signes et des symptômes de la maladie, parfois mêmes invalidants, alors que leurs médecins semblaient tout à fait satisfaits d’une TSH revenue dans la « norme ». Si tous ne répondaient pas à tous les critères de diagnostic de la fibromyalgie établis par le Collège Américain de Rhumatologie, certains possédaient la liste entière. La maladie d’Hashimoto, que la majorité des médecins appréhendent, à tort, de la même façon que n’importe quelle hypothyroïdie, a occupé une grande partie de mon temps. Le fait que des familles entières en sont affectées n’est pas banal. Puis j’ai affiné mon traitement de la fibromyalgie et du syndrome de fatigue chronique, la Guaifenesin ayant trouvé à mes yeux un grand intérêt, conjointement avec la prise en charge d’une hypothyroïdie aussi minime soit-elle cliniquement. Enfin, la découverte que la fibromyalgie et le syndrome de fatigue chronique étaient des affections auto-immunes, au même titre que la maladie d’Hashimoto, m’a encouragé à associer un traitement immunostimulant, avec des succès impressionnants. En fin de compte, il se pourrait que toutes les trois, à des degrés divers dans leurs manifestations cliniques, aient un même problème auto-immun sous-jacent.

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